VENDREDI 21
"À
Gaza, il faut arriver le soir au printemps, s’enfermer dans sa
chambre et écouter les sons qui entrent par les fenêtres
ouvertes…
Nous sommes en 2018. J’ai 25 ans et je suis un
voyageur étranger.
Je rencontre de jeunes palestiniens de
mon âge." Piero Usberti
Construit
à partir d’images tournées quelques années
avant les attentats perpétrés par le Hamas et les attaques menées
en retour par l’armée israélienne mais monté
en pleine guerre Israël Palestine,
le film de Piero Usberti développe un récit très personnel fait de
rencontres avec des jeunes gens dont il nous fait partager les
émotions, les refus, les engagements. Ecriture située, point de vue
habité, regard personnel, le film nous confronte à cette guerre
implacable lui donnant une portée universelle qui nous concerne
tous. Bouleversant.
18H30
1973,
immigrés à Saint Etienne
Saint
Etienne en 1973. Un film dans l’urgence. Des immigres en grève
de la faim. Des gens qui les soutiennent. Jusqu'à la victoire. Un
film qui fait du bien.
Monique
et Michel Pinçon-Charlot, sociologues de la grande bourgeoisie
s’aiment depuis plus de cinquante ans et pourraient aujourd'hui
profiter de leur retraite confortable. Mais comme ils sont un peu
dingues et plus que sensibles à l’injustice, ils ont décidé
d’accélérer leur combat contre le système capitaliste
planétaire. Une certaine forme d'urgence. Le film Un ancien chefde
Basile
Carre-Agostini avec une belle complicité les suit au jour le jour
dans leurs luttes. De l'intimité d'un lit à deux aux débordements
de la rue, de leurs questions personnelles aux réponses collectives,
nous les suivons, partageant leur formidable vitalité et leur refus
de la domination, retrouvant à leur côté la puissance du dire non.
Une leçon d'histoires pas comme les autres.
SAMEDI 22
14h De la conquête
Jamel, Matthieu, Ali… ont entre 20 et 35 ans et viennent des quartiers populaires de Sevran. Ils racontent pour la première fois leur parcours, leur idéaux et leur façon de surmonter l’adversité, loin des clichés sur les jeunes hommes de banlieue dont ils sont souvent les victimes. De leurs récits nait une œuvre théâtrale. Elle sera jouée dans l’intimité des appartements de cette ville jusqu’ici sans théâtre. Lors de ces représentations, artistes et public vont inventer de nouveaux espaces de dialogue dans lesquels les mondes vont se rencontrer. Réalisé dans une réelle proximité, toute en nuance, « Là où tout se joue » a cette qualité essentielle de ce qui se crée dans l’instant et trouve son souffle et sa durée dans nos vies partagées.
14h Mémoire du corbeau
Un
ancien grand chef amérindien se souvient. Son passé éclaire notre
présent.
16h En attendant les robots
Nuits et jours, Otto efface pour un centime d'euros des visages sur Google StreetView. C’est l’une des tâches que lui et bien d'autres de par le monde réalisent sur Amazon Mechanical Turk. Entouré d'écrans, plongé dans l'obscurité de sa chambre, Otto quitte progressivement le monde réel et disparait dans la matrice d'un univers virtuel ou il se perd peu à peu. En attendant les robots est un film déroutant et nécessaire, car au-delà de sa mise en cause des plateformes numériques et des développements des IA tous azimuts, c'est une nouvelle forme de vie, la vie déréalisée qu'il dénonce. Glaçant.
16h00 Chivas – Les bus psychédéliques de Colombie
Chivas"
signifie "chèvres". C'est le surnom des bus qui circulent
en Colombie dans les zones rurales reculées des Andes. Ils
permettent les échanges entre les hameaux isolés de cultivateurs de
café, bananes, cacao etc... et les petites villes. Ceux des régions
de Caldas et Antioquia ont la particularité d'être couverts de
peintures psychédéliques. Cette tradition singulière est née dans
les années 50/60 alors qu'un jeune peintre en lettre de Medellín,
junkie sur les bords, se voit proposer par un chauffeur de décorer
son bus... Ce film documentaire accompagne un livre éponyme réalisé
par les Éditions Infinies.
16h00 Pas de porte – épisodes 1 & 2
Pas
de porteest une série de films chorégraphiques, éclairs et décalés. Un
pas de coté prêt à danser.
18h45 Anhell69
La
nuit, un corbillard file dans les rues de Medellin, la deuxième plus
grande ville de Colombie. Le jeune réalisateur d’Anhell69,
Theo Montoya, s’est glissé dans le cercueil à l’arrière, les
yeux clos, la voix sourde, comme étouffée par le poids d'un passé
récent et qui ne passe pas. Images, témoignages et voix off
racontent et nous donnent à voir la disparition des compagnons de
Theo Montoya, tous de la communauté lgbt+, tous disparus face à une
répression ignoble et meurtrière. Son film est une expérience
inclassable. Entre documentaire et fiction délirante, il nous fait
vivre l'invivable d'une situation d'exclusion et de mort.
Bouleversant, il filme la face cachée d'une tragédie, en refusant
tous les codes, ceux du cinéma comme ceux d'une société gangrenée
par le pouvoir et l'ordre, ceux d'un monde totalitaire. Peut-être le
film le plus actuel et le plus nécessaire de notre programmation.
21h30
Adieu
sauvage
Adieu
sauvageest un voyage au lointain de nos vies et une quête mélancolique des
origines. Pour Sergio Guataquira Sarmiento, il s'agit de renouer avec
son indianité amazonienne et de sortir des lieux communs d'un
occident par trop exclusif. Rendu chez les Cacuas, un peuple
indigènes de Colombie, ceux-ci vont lui apprendre ce que c’est que
d’être un autochtone et lui faire découvrir les émotions
existentielles qui habitent leurs vies. Avec humour et beaucoup
d’autodérision, Sergio Guataquira Sarmiento réussit un film à la
première personne, envoutant et attachant. Il installe une vérité
singulière qui demande le partage et son écriture nous accueille
comme des amis de longue date. Un rare moment de cinéma.
DIMANCHE 23
Frieda
TV est
le film d'une rencontre et d'une amitié née de cette rencontre.
Léa Lanoé filme Gerda Frieda Janett Gröger. Cette dernière en
butte à tous les mots d'ordre de notre société, invente ses
propres façons d'être là et les nourrit de son désir de vivre
libre, sans codes ni normes. Elle échappe à toute tentative d’être
saisie, fixée, définie. Et loin d'un sujet à traiter ou d'un
portrait à faire, Léa Lanoé chemine avec elle, au jour le jour,
dans une complicité première et formidable. Le film nait de ces
moments à deux, fragments d'une aventure essentielle car vivante et
vraie. Réussite exemplaire, FriedaTVexpérimente sans cesse la justesse de son écriture, tout comme
Frieda et Léa improvisent les méandres de leurs propos. Ici rien
n'est donné, tout s'invente au grès de la rencontre. Et cette
liberté de tous les instants, nous appelle et nous contamine, nous
invitant à nous joindre à elles jusqu'à trouver notre place au
sein du film, Le cinéma est au centre de cette aventure.
16h00 Paradis
Été
2021, des feux incontrôlables ravagent la taïga au nord-est de la
Sibérie, tout au bout du monde. Tellement au bout du monde que la
Russie n’en a que faire : secourir ces lointains habitants
coûterait trop cher, ces derniers peuvent bien périr dans les
flammes et l’État ne se souviendra de la région que quand il
s’agira d’en piller les ressources. Un portrait de Poutine est
accroché au mur d’un établissement officiel et il semble s’être
étrangement échoué là.
Paradisd'Alexander Abaturov pourrait se limiter à nous montrer une
catastrophe écologique rendue possible par un capitalisme cynique et
inhumain. Mais la force et la justesse de son film naissent de la
manière dont il nous raconte ce qui fait communauté avant, pendant
et après les incendies. Ce qui tient ces hommes et ces femmes
ensemble, quelque par autonomes et vivants. Une leçon de vie où
nous avons une place, car nous renvoyant à notre présent avec
beaucoup d'intelligence.
18h30 Métal et mélancolie